Loi Thomas
« Modulations budgétaires »
« Modulations budgétaires »
Établir un projet de loi de finances en pleine tourmente est une mission impossible quel que soit le gouvernement en place. Avec la guerre à moins de deux milles kilomètres, avec des matières premières et des ressources énergétiques aux prix erratiques, avec une inflation en hausse, l’art de la prévision est de plus en plus divinatoire. Seule certitude, la rigueur n’est pas pour demain. Avec un déficit budgétaire de 158,5 milliards d’euros, la création de près de 11 000 postes et le maintien d’un soutien au pouvoir d’achat chiffré à 45 milliards d’euros, le keynésianisme est de mise. Les dépenses de l’État devraient s’élever à 480 milliards d’euros l’année prochaine quand les recettes ne devraient pas dépasser 320 milliards d’euros. La plupart des ministères, ce qui est rare, enregistrent des augmentations de budget. L’Éducation gagne 3,7 milliards d’euros pour un budget global à 60,2 milliards. Les moyens de la Défense augmentent de 3 milliards tandis que ceux de la mission Travail et emploi, progressent de 3,7 milliards d’euros.
Pour faire face à ses engagements, l’État empruntera, en 2023, 270 milliards d’euros sur les marchés ce qui constitue un record. Avec des taux d’intérêt en hausse, le service de la dette qui a été longtemps une source d’économie devrait dépasser 60 milliards d’euros. Le gouvernement a certainement minoré le coût de l’endettement en retenant un taux d’emprunt moyen en 2023 de 2,5 % quand, déjà au mois de septembre 2022, le taux de l’OAT à 10 ans a dépassé 2,7 %.
Le budget 2023 est un budget de guerre pour un pays qui ne l’est pas réellement. Il s’affranchit pour la quatrième année consécutive des règles de bonne gestion édictées par l’Union européenne, l’habitude aidant, le retour à une gestion rigoureuse sera difficile. Indéniablement, la France comme d’autres pays européens est entrée dans un cycle de fortes dépenses publiques et d’endettement croissant. La question de la sortie de route ne pourra que se poser à un moment ou un autre. L’Italie et le Royaume-Uni sont dans l’œil du cyclone. La France pourrait les rejoindre assez rapidement. Le pari du gouvernement est un regain d’activité grâce à un choc de compétitivité. L’inflation moins forte en France devrait rendre l’économie plus compétitive. La spécialisation touristique du pays pourrait l’avantager par rapport aux pays industriels confrontés à la transition énergétique et au renchérissement du coût de l’énergie. Cet avantage comparatif de la France est tout relatif compte tenu de l’augmentation inquiétante de son déficit commercial et notamment industriel.
Les finances publiques françaises ressemblent de plus en plus à un équilibriste sur un filin et qui n’aurait plus de ligne de sécurité en cas de chute. Pour le moment, tout va à peu près bien mais au moindre coup de vent, la situation pourrait devenir périlleuse.
Jean-Pierre Thomas Président
de Thomas Vendôme Investments